L’IA Gère les Tâches, mais l’Intelligence Émotionnelle Guide l’Équipe

Note : Original en anglais.  L’intelligence artificielle prend désormais en charge une part croissante des tâches routinières, voire cognitives, libérant ainsi les êtres humains pour des activités à plus forte valeur ajoutée. Cependant, cette évolution met en lumière un nouveau fossé en matière de leadership : la capacité à se connecter, inspirer et guider les personnes dans un contexte d’incertitude. En 2025, l’intelligence émotionnelle (IE) – l’empathie, la conscience de soi, l’autorégulation et les compétences sociales – est devenue la compétence déterminante pour les dirigeant·e·s qui favorisent l’adoption de l’IA, la confiance et l’engagement au sein des organisations.

L’IA prend rapidement en charge de nombreuses tâches répétitives et basées sur des règles, autrefois effectuées par des cadres ou des spécialistes. La planification, la saisie de données, la création de rapports et même certaines parties de l’analyse sont désormais exécutées plus rapidement et avec moins d’erreurs grâce aux outils d’automatisation. Le McKinsey Global Institute indique que les travaux manuels routiniers et cognitifs de base sont les plus touchés.

Cependant, l’IA peine toujours à maîtriser les aspects profondément humains du leadership : le jugement dans des situations incertaines, la capacité à donner du sens face à des priorités contradictoires et la construction de la confiance au sein des équipes. C’est précisément dans ces domaines que l’intelligence émotionnelle fait toute la différence. L’IA peut faire remonter des informations, mais elle ne peut pas créer du sens ni de l’empathie. Elle peut prédire des risques, mais elle ne peut pas rassurer un·e collaborateur·rice inquiet·ète ou rassembler une équipe autour d’un changement.

À mesure que les systèmes d’IA se développent, les dirigeant·e·s ne sont plus valorisé·e·s pour la quantité d’informations qu’ils ou elles contrôlent, mais pour leur capacité à se connecter, à communiquer et à guider les autres à travers la transformation. Le résultat : un passage clair de la gestion des tâches à la gestion de la confiance.

L’adoption de l’IA n’est pas seulement un déploiement technologique. C’est un changement organisationnel qui transforme les rôles, les processus et même la confiance envers la direction. Les recherches montrent que, bien que la majorité des entreprises aient investi dans l’IA, seules environ 1 % d’entre elles décrivent leur adoption comme pleinement mature. La différence entre les débuts difficiles et un succès durable repose souvent sur un seul facteur : l’intelligence émotionnelle.

Les dirigeant·e·s doté·e·s d’une forte IE maintiennent leurs équipes engagées et sereines lorsque l’IA modifie les manières de travailler. Ils et elles créent un climat de sécurité psychologique, permettant aux collaborateur·rice·s de poser des questions, de signaler des risques et d’expérimenter de nouveaux outils. L’empathie, la pensée critique et l’intelligence émotionnelle se hissent désormais au même rang que les compétences analytiques, formant ce que l’on appelle “l’intelligence authentique” — un équilibre entre les capacités humaines et celles des machines.

L’IE joue également un rôle clé dans le respect de l’éthique. Un·e dirigeant·e conscient·e de soi détecte les biais dans les données ou les processus décisionnels avant qu’ils ne nuisent à la confiance. Un·e manager doté·e de compétences sociales peut présenter l’IA non pas comme une menace, mais comme un levier pour un travail plus porteur de sens. C’est ainsi que les organisations transforment l’anxiété en adoption, et la confusion en collaboration.

Développer son intelligence émotionnelle ne se résume pas à « être empathique ». C’est un ensemble de compétences concrètes qui aident les dirigeant·e·s à guider leurs équipes à travers le changement. Quatre capacités fondamentales ont le plus grand impact sur la réussite de l’adoption de l’IA.

1. L’Empathie : Écoute Active et Compréhension du Sens

L’empathie permet aux leaders de comprendre comment les collaborateur·rice·s ressentent l’IA, et pas seulement ce qu’ils ou elles en pensent. Les séances d’écoute, les feedbacks anonymes et les entretiens réguliers créent un espace où les préoccupations réelles peuvent émerger. Les équipes qui se sentent écoutées s’adaptent plus rapidement et font davantage confiance aux décisions du leadership.

2. La Conscience de Soi : Vérification des Biais et Hygiène Décisionnelle

Les leaders conscients d’eux-mêmes reconnaissent comment leurs propres hypothèses influencent les décisions liées à l’IA. Ils prennent le temps de remettre en question les sources de données, les biais algorithmiques et leurs angles morts personnels avant d’agir. Cela renforce la crédibilité et l’équité dans chaque décision de changement.

3. L’Autogestion : Maîtriser le Stress et l’Incertitude

Les transitions liées à l’IA provoquent souvent de l’anxiété concernant les rôles et la sécurité de l’emploi. Les dirigeant·e·s qui savent gérer leurs émotions sous pression incarnent la stabilité. Des techniques simples comme les pauses de réflexion, l’écriture de journal ou le coaching entre pairs permettent de garder des réactions équilibrées.

4. Les Compétences Sociales : Influence et Résolution de Conflits

Les leaders dotés de compétences sociales rassemblent les personnes au-delà des départements. Ils communiquent clairement la finalité de l’IA, apaisent les tensions et encouragent la collaboration. Lorsque les dirigeant·e·s font preuve d’empathie et de calme, les taux d’adoption augmentent dans toute l’organisation.

Les données sont claires : l’automatisation s’accélère, et avec elle, la demande pour des compétences centrées sur l’humain. Cela crée un double défi pour les responsables RH et les dirigeant·e·s du développement des talents. D’un côté, les organisations doivent former les collaborateur·rice·s à la maîtrise technique des systèmes d’IA. De l’autre, elles doivent renforcer l’intelligence émotionnelle à tous les niveaux de leadership pour maintenir l’engagement et la motivation tout au long de cette transition.

Pourtant, malgré d’importants investissements dans les outils d’IA, le niveau de maturité reste faible. Le consensus de divers rapports confirme que les entreprises peinent à intégrer l’IA dans les processus quotidiens, principalement en raison d’une résistance culturelle et d’un manque de confiance. C’est là que le leadership émotionnellement intelligent devient un facteur multiplicateur, aidant les équipes à relier les nouvelles technologies à leur raison d’être et à leurs valeurs partagées.

Pour les responsables RH, la prochaine frontière ne se limite pas aux capacités numériques. Il s’agit de développer les capacités humaines à grande échelle : des programmes de requalification qui associent montée en compétences techniques et développement du leadership fondé sur l’intelligence émotionnelle.

Développer l’intelligence émotionnelle ne doit pas nécessairement prendre des années. Avec de la structure et de la responsabilité, les équipes RH et les dirigeant·e·s peuvent obtenir des progrès mesurables en trois mois. Voici un plan d’action sur 90 jours utilisé par des organisations qui avancent dans leur transformation IA tout en renforçant leur leadership humain.

Semaines 1–2 : Établir une Base de Référence

Réalisez une évaluation à 360° de l’IE pour les managers. Associez-la à un sondage rapide sur la sécurité psychologique afin de comprendre le ressenti actuel des équipes.

Semaines 3–6 : Pratiquer à Petites Doses

Introduisez des habitudes quotidiennes d’écoute, de brèves réflexions et des « pré-mortems décisionnels » pour identifier les biais émotionnels ou cognitifs avant les décisions clés. Encouragez les leaders à consigner leurs apprentissages et à partager une leçon par semaine.

Semaines 7–10 : Façonner les Normes et les Récits d’Équipe

Organisez des discussions d’équipe sur le rôle de l’IA : ce qu’elle change, ce qui reste humain et ce qu’elle permet. La clarté et la transparence réduisent la peur et stimulent le sentiment d’appropriation.

Semaines 11–13 : Mesurer et Ajuster

Réévaluez l’engagement, les taux d’adoption et le ressenti général. Discutez des enseignements dans des réunions de leadership. Considérez l’intelligence émotionnelle comme une pratique continue, et non comme une formation ponctuelle.

Lorsqu’il est bien mis en œuvre, ce cycle de 90 jours développe la conscience de soi, l’empathie et la résilience, améliorant directement les résultats d’adoption de l’IA.

De nombreuses entreprises investissent massivement dans des plateformes d’IA, mais négligent le volet humain de la transformation. Les outils et formations axés uniquement sur les compétences techniques ne changent pas la manière dont les leaders communiquent, écoutent et soutiennent leurs équipes. Les programmes les plus efficaces combinent désormais coaching, simulation et feedback en temps réel pour renforcer l’intelligence émotionnelle en action.

Le coaching en leadership, par exemple, aide les managers à aborder les conversations difficiles liées à l’IA avec empathie et clarté. Les mises en situation peuvent simuler la résistance à l’automatisation ou aux décisions basées sur les données, préparant les leaders à réagir avec compréhension plutôt qu’avec défensive.

Les modèles de formation évolutifs, tels que l’apprentissage mixte ou les cercles dirigés par les pairs, rendent cela possible même dans de grandes organisations distribuées. Les équipes RH qui associent formation numérique et moments de réflexion en direct peuvent transformer l’anxiété liée à l’IA en confiance et en collaboration.

Alors que l’IA automatise les tâches routinières et analytiques, la valeur distinctive des leaders ne réside plus dans la maîtrise technique, mais dans la connexion émotionnelle. Les données conduisent toutes à la même conclusion : les organisations qui allient capacité technologique et leadership émotionnellement intelligent surpassent celles qui considèrent l’IA comme un projet purement numérique.

Les dirigeant·e·s qui développent l’empathie, la conscience de soi, l’autogestion et les compétences sociales deviennent le lien entre innovation et confiance. Ils et elles transforment le déploiement de l’IA en une opportunité d’engagement plutôt qu’en une source de résistance.

Pour les cadres RH et les dirigeant·e·s d’entreprise, c’est le moment d’investir dans “l’Intelligence Authentique” — le développement de compétences humaines qui complètent, plutôt que de concurrencer, les machines.

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